ALBUM: Téléphone “Crache ton Venin” (EMI, 1979)

Depuis longtemps déjà le sort de Téléphone en France est plié. Le groupe a ses fans (nombreux) et ses détracteurs (tout aussi nombreux). Il n’est pourtant pas inutile de réécouter leur discographie, avec un oreille innocente et pure. Les carrières variét’pépère actuelles de Jean Louis Aubert et Louis Bertignac ne doit pas nous faire perdre de vue que Téléphone était un véritable groupe de rock !

Crache Ton Venin (1979), leur deuxième album, en témoigne ardemment: le groupe parisien en avait sous la semelle et comprenait l’esprit de l’idiome rock. Ce n’est pas tout à fait un hasard. Le groupe se forme au Centre Américain de Paris en 1976. Là bas le groupe y donne son premier concert. Téléphone est la rencontre entre deux duos. Jean-Louis Aubert (chant et guitare) et Richard Kolinka (batterie) jouent dans plusieurs groupes ensembles. L’un d’entre eux (Semolina) sort même un 45 tours (avec le plutôt pas mal Plastic Rocker) chez Atlantic. De leur côté Louis Bertignac (guitare) et Corine Marienneau (basse) jouent dans Shakin’ Street jusqu’au festival punk de Mont-de-Marsan de 1976.

Après ce premier concert, la sauce prend et Téléphone sort un premier 45 tours chez Tapioca puis un premier album enregistré par le Britannique Mike Thorne, aussi aux manettes pour Wire et Soft Cell! Deux ans plus tard, ils reviennent avec ce deuxième album, Crash Ton Venin, également enregistré en Angleterre, par un certain Martin Rushent. Ce dernier est un des grands producteurs britanniques de la fin des 70s et début des 80s. Buzzcocks, Human League ou les Stranglers font parti de ses plus belles réussites.

Cette collaboration réussit bien à Téléphone même s’il faut noter quelque choix de mixage un peu clivants sur la stéréo ou la reverb’ de la batterie. Le groupe signe un album compact et sans temps morts. Si Crache ton Venin et surtout La Bombe Humaine sont les morceaux les plus emblématiques de ce disque, ils ne donnent pas forcément un bon aperçu de l’album. Celui-ci surprend par sa cohérence et sa qualité générale.

Téléphone y déroule un rock nerveux à l’os, assez classique sur le fond mais pas pour autant conservateur. Téléphone n’est certainement pas un groupe punk, mais ils sonnent bien dans leur époque. En un sens, le groupe parisien appartient à la même dynamique que des formations comme The Romantics aux Etats Unis ou Tequila! en Espagne (l’excellente Faits divers). Comme ces groupes, Téléphone doit quelque chose aux Rolling Stones sans pour autant leur coller trop au derrière (Facile). Certaines chansons (la très bonne Ne Me regarde pas) sonnent même presque powerpop !

La fin de parcours surprend agréablement. Téléphone se fait plus funky. Un peu de ton amour ose se faire dansante et groovy. Le riff pourrait presque convoquer celui de Long Train Running des Doobie Brothers. Crache ton Venin se conclue enfin sur Tu vas Me Manquer. Le groupe français y pousse le curseur funk-rock encore un peu plus loin. La chanson offre une suite à Miss You des Stones ou Why did you do it de Stretch.

En seulement dix morceaux, Téléphone signe, avec Crache Ton Venin, un classique du rock français. L’album n’a absolument pas à rougir face aux groupes contemporains anglo-saxons. Il s’inscrit d’ailleurs dans une dynamique similaire à d’autres formations internationales. Téléphone s’y montre inspiré, vif et remuant. L’alchimie musicale entre les quatre membres du groupe saute aux oreilles. Quelque soit les tractations en coulisse, ces quatre là savent jouer ensemble et en tirer un rock juste et sincère.

note personnelle: 4,5/5

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