Il y a 5 ans je publiais sur Section-26 un article sur Some People Are On The Pitch They Think It’s All Over It Is Now, le premier album des Dentists. Avant cela, il y avait eu un premier 45 Tours, publié en 1985: Strawberries are growing in my garden (and it’s Wintertime). Celui-ci a d’ailleurs aussi eu le droit à un papier dans Section 26 ! À mon tour de l’évoquer ici même.
Les Dentists viennent d’un coin un peu particulier de l’Angleterre: le Kent et plus spécifiquement la région du Medway, la rivière qui traverse le coin. À la fin des années 70 et surtout dans les années 80, une véritable scène se constitue dans les parages dans des villes telles que Rochester ou Chatham. Cette Medway Scene fournit à l’Angleterre de remarquables groupes. Billy Childish en est l’évidente figure tutélaire. Depuis les années 70, l’artiste, le poète, a multiplié les groupes: Pop Rivets, Milkshakes, Thee Mighty Caesars ou encore Thee Headcoats. Il n’est cependant pas seul. Holly Golightly ou Graham Day sont aussi des habitués de la scène. Au début des années 80, ce dernier est le chanteur des magnifiques Prisoners, un superbe groupe modernist. Allan Crockford y joue de la basse et va filer un coup de mains à nos Dentists.
Le bassiste va en effet enregistrer les premiers pas du groupe, à savoir l’excellent 45 Tours dont il est question aujourd’hui et le premier album que je mentionnais dans l’introduction. Les Dentists se composent alors de Mike Murphy (voix), Bob Collins (guitare), Mark Matthews (basse) et Ian Greensmith (batterie). En studio ils tombent sur une rickenbacker qu’ils vont alors utiliser pour enregistrer la superbe chanson de la face A.
Strawberries are growing in my garden (and it’s wintertime) est une petite merveille de pop psychédélique. Elle renvoie à l’imaginaire britannique des années 60, au Pink Floyd des débuts, aux déclinaisons des années 80 (de Nick Nicely à Rain Parade) comme à la scène indie-pop contemporaine (REM, The Smiths). La chanson évoque un thé relevé de quelques substances hallucinogènes. Elle décrit des paysages bucoliques mais irradiants comme des tableaux de Turner.
Dès leurs premiers pas, les Dentists sont donc uniques: un pied dans la scène garage du Medway, l’autre dans la C86. Je pense que ça les rend toujours aussi attachants et uniques. Je me retrouve forcément un peu en eux tant j’ai parfois trouvé difficile de me positionner entre les deux par le passé (car oui il y a une dizaine d’année cela avait encore du sens). Je ne suis certainement pas le seul à avoir été touché par les Dentists. Trouble In Mind, le label de Chicago, a réédité ce 45 tours ainsi que le premier album: une manière de continuer à oeuvrer pour une certaine idée de la pop, esthète et élégante.