Opinion: c’est quoi un bon disquaire ?

Chacun aura sa définition d’un bon disquaire. Tout le monde ne met pas l’accent sur les mêmes choses. Pour ma part je fréquente les disquaires depuis plus de 20 ans. J’en ai vu apparaître et disparaître, parfois à regrets (ça vous intéresserait une série sur ceux qui n’existent plus?). Si je pose les choses à plat, il y a quelques aspects caractéristiques qui reviennent pour me voir devenir un régulier d’une adresse. J’ai essayé d’y voir plus clair et de faire une sorte d’introspection sur ce qui fait un bon disquaire (selon moi).

L’accueil

Pour beaucoup de gens c’est un critère essentiel. Il l’est aussi mais je vais cependant nuancer. Certaines de mes adresses favorites sont parfois tenues par des taiseux ou des propriétaires un peu taciturnes. Du coup ce qui me semble important en terme d’accueil:

  • être poli
  • laisser en paix aux gens qui regardent l’état des vinyles et ne pas les prendre pour des voleurs
  • ne pas juger négativement les achats d’une personne
  • pouvoir écouter les disques d’occasion (soit une platine libre service, soit en demandant)
  • ne pas forcer l’achat
  • ne pas être agressif si quelqu’un fait une remarque (sur l’état, le prix)
  • renseigner/conseiller les gens s’ils le demandent
  • être capable d’identifier les goûts de ses habitués et habituées
  • faire des prix spontanément (ou offrir un disque pas cher) sur l’occasion si l’addition est importante (pas une obligation mais très plaisant)
  • le lieu en lui même

La politesse semble être un minimum, presque en tant qu’individu même ! Mais j’ai quand même eu des désagréable surprises à ce niveau là parfois. D’ailleurs j’évite certaines adresses pour cette raison. Tous les parisiens ont expérimenté une certaine adresse monstrueuse vers Chatelet où la réception est lunaire (presque un bizutage en soi). À Barcelone, l’été dernier j’ai aussi eu une expérience vraiment très désagréable (la troisième en trois fois) chez une adresse bien connue du circuit des amateurs de 60/70, du nom d’une pédale d’effet.

Je suis en revanche personnellement moins adepte du customer service à l’américaine. Je peux potentiellement trouver ça désagréable d’avoir quelqu’un sur la grappe dès que je passe la porte. Je suis assez grand pour regarder et chercher par moi même dans un premier temps. Si j’ai besoin d’aide ou de conseils je sais que je peux être aiguillé si besoin. Dans tous les cas, la spontanéité est la clef !

Quand je vais régulièrement dans un endroit, j’apprécie aussi que la personne derrière le comptoir ait identifié mes goûts pour me proposer spontanément un disque ou au contraire m’alerter sur une référence qui ne va pas me plaire. Par exemple: Jean Paul de Plus de Bruit fait souvent tourner des disques à mon attention. La technique marche très bien avec moi !

L’organisation des bacs

Récemment, j’évoquais ici même le sujet combien épineux du classement des disques chez soi. Cette question se pose aussi chez les disquaires, c’est toujours plus agréable de savoir où chercher. Le passage de la porte d’un disquaire est toujours une expérience intimidante (si si) et arriver à repérer rapidement où poser ses yeux a quelque chose de rassurant.

Comme vous le savez déjà, je pense qu’il n’y a pas d’organisation parfaite, l’essentiel c’est de pouvoir appréhender le système assez facilement sans avoir à trop réfléchir. Cela peut passer par des grandes familles musicales (rock, indépendant, soul-funk-disco, jazz etc.) par exemple.

Certains disquaires ont un bac dédié aux derniers disques entrés dans le stock, je trouve l’idée plutôt plaisante quand on est régulier dans un endroit.

Je ne suis pas forcément un adepte des trop belles boutiques car généralement cela s’accompagne d’un prix élevé (rédhibitoire pour moi) mais avoir une organisation propre, des disques bien rangés (et idéalement pas trop serrés) sont des essentiels d’un bon disquaire !

Le prix

J’ai déjà un peu parlé de la question du prix ici même (Comment mettre un prix sur un vinyle ?) mais voici quelques points à surveiller selon moi:

  • Pour le neuf un écart de 2-3 euros cela fait une vraie différence
  • Pour l’occasion, le prix est une donnée à associer à l’état.

Pour le neuf, tout le monde se fournit plus ou moins au même source. Certains ont le courage de s’adresser directement aux labels (et cela peut faire une grosse différence de prix à l’arrivée) mais sinon tout le monde paie plus ou moins les mêmes prix. Quand vous constatez des écarts de prix de quelques euros, ce sera souvent sur toutes les références que les disquaires sont susceptibles d’avoir en commun. Bien sûr, chacun adapte les prix en fonction de son ressenti et sa clientèle, mais généralement, il y a un système de marge qui sert de base pour calculer le prix.

Pour l’occasion: un disque en mauvais état est presque toujours trop cher. Si le vinyle (support) est en dessous de VG+ il faut une vraie décote par rapport au prix de référence. Il faut aussi essayer d’être(assez) compétitif par rapport aux prix moyen de discogs. C’est OK de moduler la valeur d’un disque en fonction de sa capacité à le vendre, de sa disponibilité en France (et dans l’Union Européenne) ou de son état. Je trouve ça aussi normal que le disques pas chers sur discogsmoins de dix euros par exemple) le soit d’avantage en disquaire, toujours dans une certaine mesure. Si le disquaire fait bien son travail et propose une copie très propre d’un disque, c’est jamais absurde de la payer un peu plus que le prix de référence et de ne pas avoir à racheter le vinyle cinq fois !

Mon astuce personnel pour savoir si un vendeur/disquaire est cher: sonder quelques références pour lesquels je connais bien les prix.

le choix

Le choix est le nerf de la guerre et fait souvent la différence entre un bon disquaire et un autre. Le choix dépend de l’orientation du disquaire évidemment. N’attendez pas d’un disquaire de rock indépendant qu’il ait un énorme rayon de nouveautés en hip hop par exemple (et inversement). En pratiquant régulièrement, vous pourrez même identifier qui aura un disque que vous cherchez en particulier. J’ai déjà réussi à trouver chez un disquaire, un vinyle d’occasion que je cherchais spécifiquement (pour ne pas le citer: Diane Tell chez Plus de Bruit) ! Chaque disquaire a sa propre couleur, ne leur en voulez pas de ne pas avoir nécessairement une référence qui ne correspond pas à leur spectre musical.

En neuf: votre disquaire fait-il appel à plusieurs distributeurs ? Prend il l’initiative de lui même contacter des labels? A-t-il régulièrement du réassort ? Suit-il bien les sorties ? Comment réagit-il quand vous lui parler de sorties qu’il n’a pas (dans son champ d’action) ? Tout cela fera d’un disquaire, un lieu dans lequel vous reviendrez avec plaisir !

En occasion: est-ce qu’il a des disques qui sortent de l’ordinaire ? Dans quelle mesure le disquaire renouvelle-t-il son stock ? Quelles sont ses sources d’approvisionnement (des clients qui ramènent ? des achats de collection ?) ?

Illustration: une photo du stand de Richard aux puces de St Ouen, un de mes spots favoris, désormais fermé, j’en suis toujours très triste !

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