Mes premiers textes sur la musique ont maintenant une bonne vingtaine d’années. J’ai commencé l’écriture pour un site généraliste sur l’information à la fac. Elsa Kuhn m’y avait fait entré. De mémoire le site s’appelait Stopinfo, c’était autour de 2001/2002. Je ne me souviens plus exactement de tous les disques chroniqués mais parmi eux figuraient: le premier album d’Alex Krygier, un mix de Total Science (Industrial Revolutions) ou une sortie du label breakbeat français Bazoline (Ne Pas). Dans les années suivantes j’ai contribué à d’autres webzines dont un certain nombre existe encore tels que Indiepoprock ou SoundofViolence. J’avoue ne pas me souvenir de tout. Je suis incapable de me rappeler si j’ai contribué ou non au site Liability par exemple (je crois me souvenir de l’interface pour entrer les textes). Toujours est-il qu’en 2007 on lance, avec le frangin aidé de quelques potes, le blog Requiem Pour Un Twister. Pendant des années ce sera mon principal moyen d’expression avant qu’il ne soit supplanté par Magic (historique) puis Section 26 et désormais ici. J’ai aussi fait quelques piges ailleurs ponctuellement (RnF, Trax etc.).
Lycée et Lester Bangs
L’écriture ne me semblait pas si évidente quand j’étais plus jeune. Au lycée j’ai suivi une filière scientifique et tout ce qui relevait de la filière littéraire me paraissait mystérieux. Bref je n’ai jamais eu confiance en mes capacités de m’exprimer à l’écrit. Je crois que Psychotic Reactions de Lester Bangs m’a beaucoup décoincé. Comme le punk, l’écriture du journaliste américain est très libératrice. Lester Bangs est parfois drôle, parfois à coté de la plaque, parfois halluciné mais il se dégage un truc puissant de sa prose. Lester Bangs ne cherche pas à avoir une belle écriture mais se sert néanmoins des mots d’une manière juste. Cela a durablement influencé mon approche. Il a éloigné cette peur de mal écrire en mettant l’accent sur d’autres aspects de l’écriture.
Gonzo (not) Gonzo ?
J’ai eu quelques velléités gonzo à certains moments mais globalement l’écriture à la première personne n’est pas ce que je maîtrise le mieux (oui ce texte est à la première personne et je l’utilise souvent dans mes introductions ici). Je trouve ça toujours complexe de se mettre en scène quand on parle d’un disque. Est-ce que mon expérience avec cet album mérite d’être mise en avant et peut intéresser les gens ? Certains le font très bien, d’autres fois ça tombe à plat. L’exercice est finalement plus difficile que de s’effacer derrière la musique. Pour ma part, il m’arrive d’utiliser la première personne pour parler de certains disques tant ils sont significatifs dans mon parcours personnel mais ce n’est pas si courant. Ici j’écris généralement un paragraphe à la première personne pour introduire mes choix de disques avant de passer sur un ton plus neutre.
l’épure et l’écriture
Je pense qu’au départ, nous sommes tentés de montrer que l’on sait écrire, que l’on a du vocabulaire. Avec le temps on s’éloigne de ce tropisme pour valoriser le disque plutôt que nous même. Les anglophones parlent parfois de purple prose (wikipedia) pour évoquer l’écriture qui prend le dessus sur le fond. Quand on parle de musique je crois qu’il faut toujours garder en tête qu’il faut être compris et que les gens ne s’intéressent pas forcément à la technicité de celui qui s’écrit mais plus au propos du disque. Pour moi certains journalistes arrivent vraiment à un niveau d’écriture exceptionnel. Je pense à des gens comme Christophe Basterra, Thomas E. Florin, Matthieu Grunfeld, Lelo Jimmy Batista ou le trop rare Xavier Mazure. Ces journalistes arrivent à m’étonner en saisissant l’essence d’un disque ou en développant des angles que je trouve enrichissants. Certains textes amènent ainsi des éclairages sur des œuvres que j’apprécie. À l’inverse je supporte de moins en moins les journalistes qui veulent absolument imposer leur notion du goût à leurs lecteurs. Cela peut paraître avec un autre texte de ma pomme (Trop de Musique?) où j’évoque le problème du relativisme. Pourtant je crois qu’il est possible d’avoir une approche critique de la musique sans forcément tenter d’assommer les autres d’une opinion définitive. Je pense que la vérité se situe probablement dans un entre deux: ne pas juger les critères pour apprécier la musique mais néanmoins pouvoir juger d’une œuvre au regard de ces critères.
Ce que je cherche à faire
Avec les années j’ai pris (un peu) confiance dans mon écriture. Mon approche diffère selon les médias. Chez Magic, nous avions des formats assez courts (1500 signes), il fallait donc être assez radical et ne pas hésiter à couper dans le gras. Par ailleurs avec le nombre important de chroniques, j’essayais aussi de soigner un peu ma prose et d’écriture des choses plus visuelles et percutantes. Dans le contexte de Section 26, je tente de développer du mieux que je peux mes idées et d’amener un contexte évocateur sur l’album que j’évoque. Je travaille toujours la prose, en particulier les tournures (pour éviter trop de forme passive par exemple) et les répétitions. La recherche du mot juste est toujours au cœur de mes préoccupations. J’ai systématiquement un dictionnaire de synonymes ouvert (coucou Crisco). Ici j’écris beaucoup, donc je règle moins les détails et je laisse mes doigts parler sur le clavier. J’ai tendance aussi (ici) à construire mes textes sur les disques assez rapidement et donc à souvent utiliser les mêmes structures de textes.
Quelques conseils d’écriture
Si jamais vous aviez la folie de vous lancer dans l’écriture sur la musique, voici quelques conseils que je trouve utiles.
Être sincère. N’essayez pas d’être une autre personne. Souvent quand on en fait des caisses, les gens le ressentent. Bref utilisez vos mots, vos comparaisons, vos ressentis. Vous n’avez pas les mêmes ressentis que les autres qui ont écrit sur le disque ? Ce n’est pas important ! Il faut que vous exprimiez votre vérité. Peut-être que certains ne seront pas d’accord avec vous, mais d’autres pourront en revanche se projeter dans votre texte. Cherchez à trouver votre style d’écriture. Il est potentiellement aussi bien qu’un autre.
Aller à l’essentiel. Je pense qu’il est important d’exprimer qu’une fois une idée dans un texte donné (à travers plusieurs textes c’est évidemment OK). Par ailleurs, apporter du contexte c’est chouette mais il n’est pas non plus utile de mentionner l’ensemble de la biographie du groupe. Il faut sélectionner les éléments qui peuvent amener des réflexions autour du disque que vous évoquer. Bref à vous de construire une narration autour d’un disque à partir des sources dont vous disposez. Bref ne pas caser toutes les informations dont vous disposez n’est pas un problème, au contraire. Faire des choix est très positif et facile quand on connaît la direction dans laquelle on souhaite aller.
Se relire à voix haute. Je ne le fais pas toujours mais c’est un exercice très intéressant et utile. Cela aide à placer les pauses et respiration (mon gros point faible personnel je pense). Cette technique aide aussi à améliorer la lisibilité des idées. Est-ce que le lecteur va comprendre où je souhaite en venir ? Est-ce que la phrase est suffisamment bien construire pour être limpide pour celui qui va la lire ?
Penser à la variété. Varier les tournures, varier le vocabulaire. Bref il est important de penser au rythme d’un texte, à sa sonorité. Bref pas toujours les mêmes verbes et sujets. Amener un peu de surprise au lecteur. En musique les anglophones parlent d’ear candy pour les petits détails sonores qui créent de la surprise et casse la monotonie. Je pense que nous devons aussi y penser quand le sujet s’y prête !
Expérimenter. Trouver son propre style ne se fait pas du jour au lendemain. Y arrive-t-on vraiment d’ailleurs un jour ? Dans tous les cas, il faut que l’écriture reste un plaisir. Bref ne pas hésiter à tenter des constructions différentes de mots, à essayer de placer des termes que vous avez lus avant etc. De faire des comparaisons un peu amusantes ou du moins inédites etc. Bref il est important de se chercher à travers les itérations ! De tester, de s’amuser !
Ne pas redouter la page blanche. Il est très difficile de démarrer un texte. Nous avons toujours peur des premiers mots, ils ont du mal à sortir. Personnellement pour me sortir de ce pétrin, je me dis que j’ai toujours la possibilité de réécrire l’introduction et de revenir dessus ultérieurement. Il ne faut pas s’inquiéter de jeter ses idées en vrac avant de commencer à les organiser. Je ne sais pas toujours ce que je vais écrire avant de me mettre devant le clavier. C’est important de juste lâcher prise et d’y aller et voir ce qu’il en sort. Parfois il n’y aura rien à retoucher. À d’autres occasions il faudra retravailler mais il en sortira souvent quelque chose. Bref posez vous et allez y !
Ne pas vouloir absolument imposer une lecture sur une œuvre. Il est facile de vouloir interpréter une œuvre pour qu’elle colle à notre vision du monde. Cependant la surinterprétation, le hors sujet et le contresens nous guettent. Il est important de toujours partir de l’œuvre et d’essayer de comprendre ce qu’elle nous cherche à dire. Il faut ouvrir ses chakras et ne pas vouloir faire une lecture selon une grille prédéterminée à l’avance.
illustration: capture d’écran d’un papier pour Section 26
les vrais cadors c’est chez gonzai non je rigole ils sont nul a chier ,caresse et bise a l’œil je vous adore
val. cdt