Né en 1958 en Belgique de parents musiciens (contrebasse et violon), Alec Mansion s’intéresse très tôt à la musique et étudie le piano au conservatoire de Liège. À 24 ans seulement, il sort Microfilms son premier album en 1982. Moins connu que son successeur Alec Mansion (1983), cet album est pourtant une merveille de pop moderne.
À la fin des années 70 et début des années 80, une génération très douée de musiciens émerge en Wallonie. Marc Moulin, avec ou ses collègues de Telex, réunit autour de lui ces talents (Jay Alanski, Jacques Duvall etc.). Ils participent ainsi à de nombreux succès, notamment pour Lio. Pendant quelques années, la Belgique devient la figure de proue d’une pop francophone maline et élégante.
Microfilms répond de cette logique: en douze titres, l’album développe une pop synthétique et sensuelle absolument irrésistible. Alec Mansion fait d’ailleurs appel à Telex au complet. En plus de co-produire l’album, Dan Lacksman programme les synthétiseurs. Michel Moers, sous le pseudo de Victor Szëll, signe les paroles et/ou les musiques de nombreux morceaux. Il fait aussi la pochette ! Enfin il y a Marc Moulin. Le génial musicien belge participe activement à l’écriture, la production et joue également du clavier au coté d’Alec Mansion. N’allez pas cependant croire que ce dernier n’est qu’un interprète. En plus d’être un excellent musicien, il participe aux crédits de songwriting de plus de la moitié des titres.
La bande était manifestement touchée par la grâce. Microfilms est une perle de la musique francophone que trop méconnue. Moins ouvertement funky que son successeur, l’album développe une vision singulière, à la fois proche et éloignée des disques de Telex de la même époque. Comme dans la musique de Marc Moulin, la musique afro-américaine (funk, jazz etc.) est un filigrane rouge. Cette influence est certes discrète mais omniprésente. Chaque morceau semble ainsi transporté par sa propre mélodie interne et son groove. Les compositions, les structures et les accords, brillent par leur délicatesse et leur raffinement.
Microfilms d’Alec Manson fonctionne ainsi parfaitement comme un tout. L’album offre une expérience d’écoute gratifiante. Un pied dans la synth-pop, l’autre dans la musique organique, Alec Mansion ne choisit pas son camp. Si l’ensemble de l’album rayonne par sa constance, quelques morceaux se démarquent particulièrement. Détective s’éprend d’un licencieux boogie tandis qu’Ici Là Bas nous embarque dans une précieuse ballade. Daisy nous plonge dans une synth-pop émouvante quand Falbala se fait plus dodelinante. Microfilms se conclue sur l’accrocheuse En Volant. La chanson, évoquant presque Steely Dan, offre une magnifique fin à un disque gracile.
En douze titres, Alec Mansion réussit un très beau premier album, accompagné d’une équipe de choix. Microfilms est à bien des égards unique; il regarde autant du coté de l’Europe (la pop synthétique, la variété française, la new wave) que de la Côte Ouest américaine (AOR, yacht rock). Il ne semble ainsi appartenir à aucune tradition si ce n’est une quête sensible de la modernité. Peut être trop trop mystérieux pour ceux qui ont besoin de lisibilité, Microfilms est pourtant un album particulièrement juste et délicat.
note personnelle: 4,5/5
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