Aujourd’hui je vous propose un voyage aux confins de l’univers connu. Bienvenu dans un univers insoupçonné à bien des égards. De l’artiste (Geoff Love) en passant par le label (MFP) rien ne vous sera épargné et pourtant, il y a ici à creuser pour les plus téméraires. Suivez moi je vous prie.
MFP pour Music For Pleasure est un label de disque co-créé par EMI avec l’éditeur Paul Hamlyn en 1965. À la manière de Squier pour Fender, MFP cherche à répondre à une demande pour des vinyles bon marché. Ces disques étaient généralement distribués dans des circuits alternatifs tels que supermarchés, librairies etc. Souvent les disques estampillés MFP le sont aussi de l’infâmie. Vous les trouverez bien plus souvent que la moyenne dans les bacs planqués au sol à un euro. Peut-être qu’une fois, attiré par une pochette un peu amusante, vous vous laisserez tenter: il y a des bonnes pioches notamment chez Geoff Love.
Pourtant ce n’est pas gagné. Geoff Love représente en effet le versant européen de l’easy-listening. Cet arrangeur britannique est l’équivalent local des Franck Pourcel, Paul Mauriat ou James Last. Aux univers exotiques de pacotille ou space age, se substituent une musique orchestrale, lourde sur les violons. Celle-ci est très populaire dans les années 60-70 et tous les noms cités ci-dessus vendent par palette. Sur le principe cela en fera fuir plus d’un il est certain. Pourtant, en creusant un peu (pas besoin d’utiliser de marteau piqueur pour autant) ces artistes proposent des choses très intéressantes et qualitatives. J’aurais l’occasion de le démontrer ici.
En 1975, Geoff Love approche doucement de la soixantaine. Le jeune homme publie alors très régulièrement des disques explorant les grands thèmes du cinéma et série de l’époque. Ses versions des musiques de James Bond sont ainsi particulièrement appréciés des connaisseurs. Notre disque du jour s’intéresse lui à la musique des films d’horreur et catastrophe : accrochez vos ceintures ! À la géniale pochette belge, les Français ont préféré quelque chose d’un peu plus sobre et discret. Dommage ! Le tracklisting est en revanche identique et comporte quelques doublons avec un autre disque de Geoff Love intitulé Big Terror Movie Themes (page discogs) sorti en 1976 (et lui disponible en Angleterre).
L’affaire est globalement pas très palpitante. La plupart des thèmes sont traités d’une manière assez classique et respectueuse. Pourtant, il y a aussi quelques moments plus étonnants. Le thème d’Airport 75 gagne une certaine intensité avec le traitement de Geoff Love, on penserait presque à Amicalement Vôtre de John Barry. L’autre grand gagnant de ce 33 tours est Tubular Bells de Mike Oldfield. Geoff Love en propose une version superbe tirant sur le jazz-funk. Il tire profit de la rythmique spécifique du motif pour construire un magnifique arrangement qui colle très bien avec la mélodie. On appréciera aussi une délicate guitare fuzz à mi-parcours.
Que faire et penser de ce disque ? Les moments fantastiques effacent ils un contenu par ailleurs un peu triste ? Chacun en sera juge. Pour ma part je dois dire que j’ai adoré découvrir cette version du thème de L’exorciste et je pense que ça vaut les quelques euros auxquels vous trouverez ce disque ! Peut-être d’ailleurs devriez vous vous mettre en chasse de son successeur que je mentionnais plus haut. En plus d’Airport 75 et Tubular Bells il contient une sympathique adaptation de l’excellent thème des Trois Jour du Condor de Dave Grusin et une très bonne interprétation de Death Wish d’Herbie Hancock.
Note personnelle: 2,5/5