Après Hugo Montenegro et Geoff Love, intéressons nous à une autre figure de l’easy listening des années 60-70, le Français Paul Mauriat. Rhythm & Blues, paru en 1968, chez Philips, est, selon nous, un des albums les plus consistants de sa carrière.
Comme d’autres musiciens hexagonaux (Franck Pourcel, Caravelli, voir Georges Jouvin), Paul Mauriat est un spécialiste de l’orchestration. Sur ses nombreux albums il reprend les hits du moment et leur apporte des arrangements inspirés du classique. Cascades de violons succèdent aux mugissements des cuivres. Les Clavecins fricotent avec les pianos et les flûtes. L’exercice dépend ainsi souvent du matériel d’origine et du talent du musicien.
Rhythm & Blues de Paul Mauriat se défend dans les deux domaines. Comme son nom l’indique, l’arrangeur est allé pioché dans le catalogue de la Motown, de Stax, Atlantic etc. Nous retrouvons ainsi des versions de chansons interprétées par Aretha Franklin (I Say a Little Prayer, Respect), Otis Redding (Respect, I’ve Been Loving You Too Long), Wilson Pickett (In The Midnight Hour), Ray Charles (Unchain my Heart), Les Supremes (You Keep Me Hangin On) ou James Brown (It’s a Man’s Man’s Man’s world).
Si les versions de Paul Mauriat perdent en énergie, elles n’en restent pas moins d’une belle exubérance. Le traitement orchestrale et la fantaisie des arrangements ne nuisent pas à ces excellentes chansons. Bien sûr, ce travail ne remplacent pas les versions soul/R&B plus connues mais il leur apporte un nouvel éclairage séduisant et gracieux. Paul Mauriat n’est pas un tâcheron, il a du goût et met son imagination à contribution. Sitar, clavecins, chœurs yéyé, basses au médiator, tout est raffiné et classe mais garde un sens du rythme. Du travail de qualité par un orfèvre du genre à qui on doit par ailleurs de très belles choses (étude en forme de R&B ou silver fingers).
Rhythm & Blues s’apprécie dans son ensemble, ce n’est pas toujours la règle avec les disques easy-listening de musique orchestrale. Souvent il faut piocher les quelques bons titres. Ici tout fonctionne bien ensemble et offre même quelques petits moments de bravoure. Nous apprécions la version de Respect. Unchain my Heart est aussi belle réussite portée par un agile orgue. La face A se conclue sur la superbe version de You Keep Me Hangin’ On. De l’autre coté mentionnons par exemple I Say a Little Prayer (excellente) ou le bouillonnement d’ It’s a Man’s Man’s Man’s world. À n’en pas douter Paul Mauriat a pris du plaisir à travailler ses morceaux et nous aussi en les écoutant !
PS: comme pour le disque de Geoff Love, il existe une version anglo-saxonne avec un tracklisting différent (The Soul of Paul Mauriat).
note personnelle: 3,5/5