ALBUM: Bryan’s Magic Tears “Smoke and Mirrors” (Born Bad, 2024)

Il y a trois ans, Vacuum Sealed avait été une des très belles surprises de 2021, réveillant à coup de guitares électriques et de programmations électroniques, une année un peu mitigée de mon coté. En 2024, les Français de Bryan’s Magic Tears sont de retour avec l’excellent Smoke and Mirrors, sorti le 8 novembre. Si l’effet de surprise n’est pas aussi marqué, le groupe continue sa magnifique trajectoire et pousse les curseurs un peu plus loin.

Smoke and Mirrors est toujours publié par Born Bad. Après un mini-album chez XVIII Records (La Secte du Futur, Royal Headache, Ellah A. Thaun etc.), le groupe parisien a rejoint le mythique label Born Bad, tête de proue du rock underground dans l’Hexagone depuis une quinzaine d’année. Bryan’s Magic Tears a certainement sa place au coté de Frustration, Forever Pavot, Pleasure Principle ou La Femme.

Le nouvel album poursuit le travail de sape du précédent. Comme Vacuuum Sealed, Smoke and Mirrors sort tout l’attirail baggy estampillé années 90. On pense ainsi à Chapterhouse, Stone Roses, Happy Mondays et autre Mock Turtles. Si les Bryan’s Magic Tears ne cachent pas leurs influences, c’est avant tout l’approche qui les intéressent. Il ne s’agit pas tant de copier un groupe précis mais de retrouver un état d’esprit à travers ces invocations. Bryan’s Magic Tears est ainsi à la jonction entre un rock orgueilleux et une dance music corrompue. La brit-pop d’Oasis faisant la teuf avec le big beat de Fatboy Slim ou un truc dans le genre. Au risque de se mettre tout le monde à dos, mais peut être surtout les rockeurs. Le groupe titille en effet le public indie en lui envoyant en pleine poire des séquences acides de TB-303 et une palette complète de breakbeat millésimés.

Ironiquement, cette déclaration d’intention garde toute sa force évocatrice 30 ans plus tard. Plus que jamais, rock et dance music électronique se sont éloignées et leur public aussi. Bryan’s Magic Tears file alors un coup dans la fourmilière. À l’introspection, Bryan’s Magic Tears répond par la fête et la morgue. Le groupe ne s’excuse pas de faire du rock, il parade et choisi un canon différent de la plupart de ses contemporains. Tout cela pourrait être vain si les Parisiens ne balançaient pas de vrais hymnes, pour celles et ceux qui étaient trop jeunes lors du second summer of love.

Smoke and Mirrors enchaîne les hits en puissance comme la paire Stream Roller et Fancy Cars. Parfois le groupe s’autorise à lever le pied (Death Row, Lady D) pour mieux repartir de plus belle (raised by rain, beauty and the beat, side by side). La production est très solide, impressionnante même, le disque en met plein la gueule. Le mixage est excellent et l’album, d’une manière générale, gagne d’ailleurs en amplitude par rapport à son prédécesseur. Si Vacuum Sealed comportait déjà beaucoup de Smoke and Mirrors, le groupe a choisi d’aller plus loin encore. Un choix à double tranchant: Bryan’s Magic Tears n’a jamais sonné aussi proches de ses inspirations mais emporte, encore d’avantage, tout sur son passage. Plus efficace, plus tubesque, plus indiscutable, Smoke and Mirrors sature les sens.

Le nouvel album de Bryan’s Magic Tears a une qualité rare. En prêchant l’électronique, il réaffirme une essence rock bravache et vitale. Loin de demander pardon, le groupe s’affirme plus que jamais. Smoke and Mirrors est succession d’hits vaillants prêt à tout dégommer sur leur passage. La forme en est peut être dérivative; elle s’apparente pourtant à une forme de hold up. Quelle témérité à vouloir ranimer une période souvent décriée par ailleurs ! Ici on adhère complètement au propos: Smoke and Mirrors est un des meilleurs disques de rock de 2024.

note personnelle: 4,5/5

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