Comment mettre un prix sur un vinyle ?

Deux expériences récentes m’ont poussé à écrire cet article. Il y a quelques semaines je me baladais en brocante et j’ai pu constater que de nombreux vendeurs n’indiquaient pas de prix sur leurs vinyles: agaçant ! Encore plus récemment, nous avons fait un tour à une recyclerie avec ma chérie et le prix des vinyles était franchement délirant et donc contreproductif. Je suis plus acheteur que vendeur, mon point de vue est à analyser en conséquence. Néanmoins, voici quelques réflexions qui, je l’espère, seront utiles pour des gens qui se posent la question de combien valent leurs vinyles et à quel prix les mettre pour les vendre. Cet article concerne évidemment l’occasion.

Affichez un prix sur un vinyle

Cela peut sembler être un conseil basique mais il est loin d’être appliquer systématiquement dans les faits en brocante et parfois même en disquaire (encore pire) ! C’est surtout valable pour les professionnels ou semi-professionnels, c’est à dire toute personne qui vend principalement de la musique sur un stand. Si vous vendez plein de trucs, je peux entendre que vous affichiez pas les prix et que ce soit en fonction du feeling et des opportunités. Les disques rares au mur, normal aussi de ne pas afficher les prix. Pour le reste, si votre activité tourne autour des disques, n’importe quel client va immédiatement se demander: la personne va me faire un prix en fonction de ma gueule. C’est très très agaçant. Personnellement c’est souvent une raison suffisante pour ne pas regarder les disques sur ce stand. Comme je l’expliquais dans un article, je teste souvent les prix d’un vendeurs sur quelques références que je connais. De fait s’il y a pas les prix, je ne peux déjà pas effectué cette étape préalable pour savoir si je vais regarder les disques. La plupart du temps quand les prix ne sont pas affichés, les clients vont penser que le vendeur va chercher à les rouler. Le coup classique ? Le disquaire qui cherche devant vous sur discogs: pas du tout professionnel ni positif comme expérience pour les clients ! Ne faites pas ça !

Un “bon” prix

Maintenant que nous avons vu la nécessité de fixer un prix et l’afficher, comment le définir ? Cette question est presque philosophique ! En tout cas n’importe quelle personne ayant fait un peu de sciences économiques, en reviendra à la micro-économie: l’offre et la demande. Un disque qui se vend est une rencontre, celle d’un acheteur et un vendeur. À combien êtes vous prêt à céder un disque? À quel point la personne en face de vous le veut ? Il existe un marché certes, mais une vente de disque c’est avant tout cette relation client-vendeur. Le “bon” prix est donc celui où vous vendez le disque sans vous sentir floué. Le “bon” prix est aussi celui où le client est heureux d’acheter le disque. Il existe évidemment des outils très pratiques pour fixer un prix réaliste, correspondant au marché, grâce à internet.

Internet est un allié mais soyez subtils

Commençons par ce qu’il vaut mieux éviter de faire: aller sur eBay et copier les prix que vous voyiez. Si les vinyles (et objets) sont en vente à ce prix là: ils ne sont pas forcément vendus ! Encore une fois, le prix est une rencontre entre des vendeurs et des acheteurs, il vaut mieux donc partir de sources qui compilent des ventes plutôt que des vinyles à vendre. Vous pouvez le faire sur Ebay il me semble (voici un exemple de tuto en faisant une rapide recherche). Pour les disques, deux outils dédiés sont particulièrement efficaces: popsike et discogs. Avant l’émergence de discogs, popsike était vraiment la référence. Il avait d’ailleurs prix le relai des guides édités par Jukebox ou Goldmine ! L’outil est particulièrement simple à utiliser: vous lancez une recherche dessus et regardez ce qu’il en sort. Popsike compile les résultats de vente d’un certain montant sur les sites d’enchères.

Discogs est le site de référence le plus efficace, il suffit de chercher votre disque et de regarder le prix moyen et médian auquel il se vend… Discogs a aussi cependant quelques limites. Certains disques très rares ne se vendent pas dessus et n’ont donc pas de prix ou des prix qui ne correspondent pas à la réalité (souvent en défaveur du vendeur). Autre limite: la recherche peut être fastidieuse dessus tant cela nécessite d’indiquer des pressages précis ! Par exemple, en effectuant une recherche sur Tapestry de Carole King vous pouvez avoir un prix multiplié par six entre un pressage français d’époque et une réédition haute fidélité moderne.

Quand évaluer le prix sur un vinyle ?

Si vous avez une grande quantité de disques, évaluer les prix peut être fastidieux. Voici quelques détails qui, à mon avis, méritent votre attention (liste non exhaustive):

  • Est-ce que le groupe ou artiste est populaire chez les clients potentiels ?
  • S’agit-il d’un pressage venant d’un pays inhabituel ?
  • S’agit-il d’un disque avec des caractéristiques particulières (promo, des erreurs, des morceaux ou des versions inédits, un obi, une réédition luxueuse …)
  • connaissez vous l’artiste ou le groupe ?
  • le disque semble-t-il rare ?

N’étant pas vendeur, je ne suis pas sûr de savoir ce qui est populaire chez les clients. Reste que certains artistes ayant vendu énormément à leur époque continuent de beaucoup plaire ! Je pense que des artistes comme Michael Jackson, le classic rock (Doors, Bowie, Beatles, Fleetwood Mac, Led Zeppelin) sont de bons exemples d’artistes très populaires mais dont le prix peut vite être élevé.

Le pays d’origine du pressage a aussi son importance. Des originaux britanniques ou américains peuvent être plus recherchés que leurs équivalents européens, surtout sur certaines références très populaires. À l’inverse des exemplaires de pays étonnants (Pérou, Malaisie etc.) peuvent intéresser des collectionneurs intéressés par un artiste en particulier.

Les disques moins courants d’artistes très populaires peuvent aussi être recherchés: maxi promotionnel, version en couleur, single avec des morceaux ou photos inédits…

Enfin il existe un marché pour les gens qui recherchent des disques pointus, la rareté est alors un des critères pour les prix. Il en existe évidemment d’autre, à commencer par la qualité musical du disque ! À force de fouiller dans les bacs des disquaires, il est possible d’avoir des idées de ce qui est rare et recherché. Quand quelque chose vous intrigue: faites une recherche discogs/google/popsike dessus ! L’amateurisme de la présentation, le label (le connaissez vous?) peuvent donner de bonnes indications.

Attention: ce qui est rare n’est pas nécessairement cher. Il faut que ce soit rare et que la demande excède l’offre.

Comment fixer un prix sur le vinyle avec ces informations ?

Vous avez consulté la fiche discogs. Vous avez ainsi pu avoir une idée de la valeur du disque sur le marché, cependant, la partie n’est pas encore fini. Deux détails essentiels manquent encore: l’état et le contexte.

Lors du tour à la recyclerie, j’ai eu l’impression que les prix avaient été fixé en regardant eBay vite fait. J’ai trouvé tout trop cher et surtout pas systématiquement en bon état. Quand vous fixez un prix fort (le prix de référence), il faut que le disque soit en bon (voir très bon) état. Personnellement j’ai tendance à penser que le prix moyen discogs correspond à un disque satisfaisant, c’est à dire VG+ minimum et plutôt excellent. Bref je suis prêt à payer un peu plus pour un disque mint et beaucoup moins si le disque est rincé… Je ne suis pas une exception: plus le disque est rare plus les clients seront exigeants sur l’état et donc très attentif à cette donnée.

Le contexte est un corollaire de l’état. Dans certains lieux les clients s’attendent à une sélection triée et organisée. Ils ont donc d’une part une sorte de garantie (ou un contrat de confiance pour paraphraser darty) sur l’état et d’autre part une sélection qui leur évitera de devoir mettre les mains eux-même dans la poussière. Tout cela se paye, dans le cas inverse, il faut en tenir compte dans sa politique de prix.

Savoir moduler les prix

En plus, des valeurs trouvées sur discogs, du contexte et de l’état, d’autres facteurs doivent vous guider dans la fixation définitive du prix sur un vinyle. Avez vous la clientèle pour le disque ? Dans quelle mesure souhaitez vous voir votre stock tourner ? Possédez vous des frais (une boutique) ? Combien avez vous payé le disque ?

Les prix de vente sur discogs/popsike/ouvrage de références sont utiles mais en définitive, il y a une part de sensibilité dans un prix. Il est important de savoir doser en fonction du public cible. Ce n’est pas grave de vendre plus cher que sur discogs, cela peut rester intéressant pour le client (frais de port qu’il aurait à payer) et vous pouvez aussi valoriser d’autres choses (faire découvrir une référence à quelqu’un). À l’inverse, vous n’allez pas forcément vous faire avoir en vendant en dessous du prix. Vous ferez un heureux, l’essentiel c’est que vous vous y retrouviez à la fin !

Par ailleurs quelques infos complémentaires, basées sur mon ressenti personnel:

  • 1-5 euros le 33 Tours pour du tout venant non trié en état variable, plutôt 1 pour ce qui se vend pas (les compilations cheap, la musette…) et 5 pour le plus intéressant (disco, soul, pop, rock…)
  • 0,5 – 2 euros le 45 Tours pour du tout venant non trié et en état variable (et plutôt 0,5-1 si ça a été pré-trié)
  • 10 euros pour un bon 33 tours clean même s’il vaut moins sur discogs c’est bien ! Je pense que c’est un bon prix minimum pour un bac de disquaire bien trié (en bon état: j’insiste)
  • 5-8 euros pour un 45T nickel mais commun, c’est honnête aussi en boutique

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