Le snob est souvent une figure détestée des amateurs de musique mais certains s’en revendiquent aussi pleinement. Le terme snob pourrait exister depuis les Romains mais son usage actuelle a été défini au milieu du XIXe siècle (1848 précisément) par l’ouvrage Le Livre des Snobs (The Book of Snobs) de William Makepeace Thackeray.
Le snob dans la musique
Le snob de musique peut être pédant mais aussi un passionné. Le snob c’est comme le con: c’est toujours l’autre, jamais soi. Reste que pendant longtemps il était de bon ton d’être cultivé dans les cercles de passionnés de musique. Deux chemins pouvaient alors se présenter aux snobs. Sur la voie de la sagesse, le passionné partageait et ne jugeait pas. D’autres snobs en revanche utilisaient à mauvais escient la force: mépriser ceux qui n’avaient pas les références, notamment les padawans en quête de validation par les hautes autorités. Cette dualité a toujours été au coeur du sujet. Le savoir est une arme oui, mais au service de quoi ? S’émanciper ou humilier ? On peut alors entendre facilement que le snob est aussi une figure haïe, et cela n’a jamais été autant le cas !
Déclin et poptimisme
Il y a eu un changement de paradigme, une petite dizaine d’années en arrière. Le poptimisme a largement changé l’état d’esprit général. Sortir des références obscurs est alors devenu pédant voir, insulte suprême pour ceux qui l’utilisent: classiste. Comme vous le savez j’ai du mal avec cet argument. Il y a quatre ans déjà, sur Section 26, je mentionnais le problème du mépris de classe inversé. Je l’ai rappelé plusieurs fois depuis (réflexions sur les stans, la victoire des brutes etc.). Encore une fois, tout dépend de l’angle: s’agit-il d’humilier ou d’émanciper ? Il n’empêche ce poptimisme est décidemment pernicieux. Au delà de justifier certains anti-intellectualismes primaires, il refuse aux moins aisés et aux plus éloignés de la culture, la possibilité de s’émanciper.
Coupons la poire en deux ?
Admettons le, certains snobs de la musique sont insupportables, parfois incapables de faire la part des choses ou de reconnaître qu’un disque mainstream (ou un peu moins obscur) puisse être bien ! Reste que chercher à étendre ses connaissances, à creuser un peu plus loin sont des valeurs très positives qui méritent d’être encouragées. Je pense que notre époque n’aide d’ailleurs pas à satisfaire cette curiosité. Au delà d’être dommage, c’est potentiellement aussi un problème à long terme. Elargir les horizons à travers les cultures fait aussi progresser l’empathie et permet de s’affranchir d’avantage du contexte et donc réfléchir d’une manière plus fluide et ample.
Je pense, comme souvent, que la vérité est quelque part dans la nuance. Créer un nouveau snobisme autour du fait de détester les snobs historique est aussi vain et ridicule que vouloir absolument dénigrer certaines références touchant à l’universel (au hasard les Beatles). Parfois si une chose est largement appréciée et partagée c’est potentiellement parce qu’elle est effectivement remarquable. Il faut pouvoir l’accepter mais en faisant aussi son propre cheminement personnel pour y arriver.
En illustration: une capture d’écran du top général de RYM (une excellente ressource par ailleurs !).