La récente actualité pose à nouveau la question de la stratégie à mener quand on est un média vis à vis des réseaux sociaux. Le secteur est en ébullition et se pose beaucoup de questions. Très dépendants du trafic générés , comment les médias peuvent limiter leur dépendance ?
Réseaux sociaux, portails, moteurs de recherche
Internet a toujours eu besoin de cartes et de hubs pour faciliter la navigation. Dans les années 90 les portails, forums et les webrings étaient populaires mais furent supplantés par les moteurs de recherche. Si ces derniers restent très populaires de nos jours, tout le monde a aussi pu constater que google se montrait bien moins efficace dans ses résultats que par le passé (le fameux phénomène d’enshittification). Quand nous avions monté Requiem Pour Un Twister, notre trafic était par exemple aidé, en plus des moteurs de recherche, par des blogrolls (successeurs spirituels des webrings) mais aussi le site Hype Machine. J’ai le souvenir que nous avions fait un énorme bond en visites avec le morceau easy de Tahiti 80 (lien vers la page HypeM) !
Créé en 2005, Hype Machine fut pendant quelques années un incontournable de la musique underground. L’agrégateur donnait le pouls des succès indépendants avant que les sites de streaming (Spotify et consort) ne deviennent les références pour les statistiques. En compilant automatiquement les morceaux postés par une sélection de MP3 blogs (dont on peut aussi débattre de la définition d’ailleurs), avec un système de like (des cœurs), le site était une plaque tournante pour les journalistes, les amateurs éclairés ou les gens de l’industrie musicale. Le site permettait d’écouter/découvrir les nouveautés en stream et d’aller ensuite sur les sites en lire plus dessus et télécharger les morceaux en question. D’une efficacité redoutable !
Tout ceci a cependant été vite supplanté par nos chers réseaux sociaux, en tête, en ce qui concerne la presse musicale en tout cas, facebook (ma page), twitter et instagram (ma page). Ces trois sites sont devenus des maillons essentiels de la communication sur nos publications et la manière de toucher un plus large public, voir tout simplement de nous suivre ! Notre dépendance aux réseaux sociaux est devenue énorme. Ce ne serait pas un problème d’importance si ces derniers ne se comportaient pas désormais d’une manière erratique ou du moins contraire à nos intérêts.
le problème des réseaux sociaux en 2025
Si vous suivez un peu l’actualité vous savez exactement où je veux en venir tant l’actualité autour des réseaux sociaux est intense en ce moment ! À peine une annonce de l’intégration de l’IA sur Meta, que Zuckerberg propose une détente en matière de modération des contenus et surtout l’arrêt du fact checking. Je n’ai personnellement pas d’opinion particulière là dessus, mais ça interpelle ! Quelques utilisateurs annoncent ainsi leur départ de fb mais d’autres se gardent bien de le faire d’instagram (difficile de se passer de sa dose de notoriété !).
Twitter/X est dans une situation encore plus inquiétante. Depuis sa reprise par Elon Musk et surtout la victoire de Trump aux Etats Unis, de nombreux utilisateurs annoncent vouloir quitter le site. Il y a par exemple la campagne HelloQuitteX assez populaire en France (voir aussi cet article). Si je ne souhaite personnellement pas partir, il faut reconnaître que le débat et le contenu du réseau est un peu moins intéressants qu’il ne le fut. Le site est plus clivant, cela rend le débat moins constructif tout en diminuant l’attrait quand on souhaite toucher un large public.
Dans un autre registre, TikTok devrait être banni aux Etats Unis (source), ce qui poussent de nombreux utilisateur à rejoindre le concurrent chinois RedNote (et Petit Livre Rouge en mandarin, tout un programme) dans des conditions qui ne présagent rien de bon (usages des données).
Au delà des questions politiques/idéologiques, force est de constater que les réseaux sociaux ont aussi changé de vocation. Initialement appréciés pour être des hubs les voici désormais à défendre la création de contenu sur leur plateforme, en propre. Comme le disait encore récemment Elon Musk sur X: vous êtes le média maintenant (source). Les réseaux sociaux (Meta, Twitter) défavorisent ainsi, à travers leurs algorithmes, les contenus qui font sortir l’utilisateur de la plateforme.
Quelles solutions ?
La situation est donc tendue, que ce soit pour des raisons idéologiques ou stratégiques, de nombreux réseaux sociaux offrent des perspectives bien moins satisfaisantes. Qui pour prendre le relai ? Voici quelques pistes , mais je suis preneur aussi de vos idées sur le sujet !
La newsletter est en vogue depuis quelques années et à raison ! C’est encore le meilleur moyen de garder un contact direct avec ses lecteurs. J’en ai moi même mise une en place récemment (lien – inscrivez vous !). Cette stratégie peut s’avérer payante à long terme comme en témoigne le cas de La Presse relaté par l’INA. Reste que ce genre de stratégie ne peut fonctionner qu’avec du temps devant soi. Il faut beaucoup de pédagogie pour inciter les gens à s’inscrire.
Des réseaux alternatifs à twitter/facebook intéressent aussi les gens. Beaucoup de ceux qui se sentent orphelins se réfugient en effet sur bluesky ou mastodon. Je mets un peu de coté threads (le twitter de meta) car directement lié à Zucky (et donc susceptible de subir la même chose que fb et insta).
Bluesky est certainement l’alternative la plus similaire et crédible à twitter; c’est l’ancien boss de twitter qui s’en occupe. Si j’ai créé un compte dessus (lien pour me suivre !), je suis surtout dans une position attentiste là bas. Faute de monde (?) ou un algo par encore assez entraîné, je n’y retrouve pas l’intensité du débat de twitter sur la musique (qui nourrit souvent mes textes ici !). Cela reste un réseau plutôt sympathique dont on peut suivre l’évolution.
Je ne compte pas m’inscrire sur mastodon en revanche. J’ai vraiment beaucoup de mal avec ce qui fait l’originalité du réseau: les instances. Je comprends les qualités d’un réseau décentralisé mais cela va aussi avec des défauts rédhibitoires pour moi. Le modérateur d’une instance peut tout simplement bloquer le contenu d’une autre instance s’il estime qu’elle ne correspond pas à sa ligne idéologique. Cela me pose des gros problèmes ! Cela signifie que des personnes ne pourront pas voir mon contenu parce que leur modo a dans le pif l’instance où je me suis inscrit. C’est un gros non pour moi ! Je pense sincèrement que la complexité et l’absence d’unicité vont marginaliser mastodon. Je ne crois pas au développement de mastodon mais je serais curieux d’avoir d’autres sons de cloche sur le sujet (argumentés évidemment) !
conclusions
Pour le moment je ne vois guère de véritable solution se dessiner mais il y aura bien quelque chose qui émergera de cette période de flottement non ? Je l’espère ! On (les gens qui ont besoin de récupérer du trafic et de prévenir leurs lecteurs de nouveaux contenus) a en tout cas intérêt à trouver des solutions. Peut être collectivement d’ailleurs ? Pourquoi ne pas envisager des webrings/blogrolls à l’ancienne ? ou même un portail ou une newletter commune avec d’autres médias musicaux ? Tout est possible !