Twitter est un outil formidable pour se connecter avec des gens ayant la même passion que nous mais souvent nous pouvons y lire des affirmations pour le moins péremptoire. En musique le phénomène touche plus les anglophones que nous autres francophone. Le contenu n’est pas toujours inintéressant et mérite peut être qu’on s’y penche un peu et de commenter ces tweets parfois pour le moins excessifs et provocateurs. Voici une sélection de trois messages avec mes commentaires dessus !
1 – les musiciens contemporains
Traduction par bibi: Je suis désolé mais si vous avez un blog musical vous n’avez vraiment aucune raison de recommander un album qui fête ses trente ans du plus grand groupe qui a existé plutôt qu’écrire sur la scène musicale actuelle qui a besoin d’être mise en valeur.
Je pense que le tweet fait référence à la réédition pour les trente ans de Dookie de Green Day. J’aurais pu avoir une position un peu similaire à l’intéressé il y a douzaine d’années. Je suis désormais beaucoup plus nuancé: faites ce que vous voulez !
Au début des années 2010, j’avais très envie de défendre la scène actuelle: il se passait un truc et je voulais en témoigner pour que d’autres gens nous rejoignent. Peut-être pour des questions de radar et aussi de manière de consommer la musique (CF mon article sur le streaming) mais je n’éprouve plus cet irrésistible besoin. J’aime toujours autant la musique et je souhaite toujours partagé mes découvertes mais pas forcément en me concentrant sur les nouveautés. Quelqu’un soulignait une fois que l’un des succès de la brit-pop venait du fait que les journalistes et les musiciens partageaient un même référentiel. J’avais un peu cette sensation aussi quand tous les groupes comme les Fresh & Onlys, The Mantles, The Pains of Being Pure At Heart, Woods, White Fence et d’autres sont arrivés. Je suis moins sensible aux influences actuelles (post-punk, pop slacker, grunge par exemple).
S’il y a moins de nouveautés qui me touchent (j’en trouve toujours rassurez vous mais juste d’une manière et systématique qu’avant), dois-je arrêter d’écrire ? Je ne pense pas non. Valoriser le passé et la patrimoine est aussi un travail utile. Mettre les nouveaux groupes sous les projecteurs c’est très bien mais en faire redécouvrir d’autres aussi ! Par ailleurs je pense qu’il est toujours possible de faire dialoguer le présent et le passé. Faire découvrir des nouveaux groupes à des gens qui apprécient un groupe du passé et inversement. En parlant de référentiel: je trouve que cette conversation peut justement y contribuer !
Pour en revenir à l’affirmation initiale du message sur twitter: l’auteur fait plus spécifiquement référence à un disque qui lui semble très évident. L’est-il vraiment pour tout le monde ? Des gens ne seraient ils pas susceptibles d’y venir grâce à un nouveau texte dessus ? Evidemment plus le disque est connu plus le travail est déjà balisé et donc moins risqué mais pour autant, il est toujours possible d’avoir un angle un peu original sur un disque très établi. D’une manière générale, je pense désormais qu’il faut surtout se concentrer sur la justesse du propos: est-ce que je pense ce que je suis en train d’écrire ? Au fond le choix du sujet vous appartient il me semble.
2 – “Peak Indie”
Traduction: “Ma seule pensée à propos de Best Coast: c’est un détail d’une histoire plus vaste sur les musiciens, écrivains et autres gens de l’industrie qui ont vécu le pinacle de la musique indie et qui s’adaptent à une nouvelle réalité. Si vous étiez là et êtes toujours actif alors vous pouvez probablement comprendre.”
Le twitter anglophone a été très animé en cette première moitié du mois de décembre par une intervention de Bethany Cosentino sur tik tok. En substance, la chanteuse regrette que son album soit un peu passé inaperçu malgré les moyens mis en œuvre dedans (aussi bien artistiquement que sur la PR). Ce tweet cherche ainsi à prendre sa défense et évoque un peak indie.
Les positions sur l’intervention de l’ancienne musicienne de Best Coast ont été très divisées. Certains (la majorité) ont souscrit au message tandis que d’autre ont pointé du doigt la réalité du marché. Je crois que le message que porte Bethany Cosentino est important. Il nécessite une discussion plus globale qui à mon avis touche à la manière dont la musique arrive désormais aux gens. Celle-ci est souvent un flux plus qu’un élément important de nos vies. Cela peut expliquer en tout cas le désenchantement de la chanteuse. Après, elle n’est pas la seule à avoir cette problématique qui touche de nombreux musiciens, ayant connus le succès ou non. Reste que c’est important que des gens mettent le sujet sur la table et nous incite à y réfléchir.
Pour le peak indie je ne sais pas si je suis d’accord ou nom pour définir cette période comme telle. Sur un plan personnel c’est effectivement un moment où je me suis senti très connecté à une scène indépendante (CF mon premier paragraphe !) mais pour autant sur un plan plus commercial, le rock indépendant des années 2010 n’a jamais atteint les sommets de popularité de celui des années 2000 non ? D’ailleurs à quelques exceptions près (Mac DeMarco ou Tame Impala) ce sont surtout les groupes de la décennie d’avant qui font le plein: The Strokes, Phoenix, Arctic Monkeys ou Franz Ferdinand. Enfin, je pense qu’il existe toujours un public important et une dynamique autour de la scène actuelle.
3 -“Bad Take”
Traduction: Je ne pense pas que « faire ce que VOUS voulez faire » soit un très bon conseil pour les musiciens. La musique tourne fondamentalement autour de la fête. la musique pop n’est qu’un tas de jingles sur la splendeur des fêtes. On ne démarre pas de bonnes soirées en refusant de se soucier de ce que veut le public.
Ce message de twitter a fait débat et a été plutôt accueilli froidement. Il est pas aussi stupide que ça (au delà de son coté provocateur) et rejoint aussi nos deux précédents tweets.
Contrairement à son auteur, je pense que le meilleur conseil à donner un artiste (musicien ou autre) reste de se trouver. Pour le dire autrement: faire ce que vous voulez. J’y mets cependant une nuance supplémentaire. Il me semble important de travailler pour se trouver de s’en donner les moyens. Faire ce que l’on veut implique en effet d’affiner ses envies, de les comprendre, les faire murir etc. Cette liberté ne me semble pas gratuite: il faut y mettre du sien et s’investir.
Du coup j’en viens à la seconde partie du message: faut-il écrire sur les fêtes pour faire de la musique qui donne envie de faire la fête ? Je pense que la réalité est évidemment plus riche que ça heureusement ! Reste qu’à l’inverse, beaucoup de critiques et de musiciens eux mêmes, peuvent envisager l’art que sous un angle sérieux. Or, à l’inverse, la légèreté ou l’évasion ne sont pas des gros mots et des objectifs tout aussi nobles et légitimes. Tous les sujets sont bons à traiter y compris ceux qui semblent les plus simples ou triviaux. Ils peuvent tout autant être synonyme de qualité. Prenons un exemple au cinéma: une bonne comédie nécessite une habilité du rythme très importante, tandis qu’un film expérimental peut reposer sur des qualités plus éthérées. Surtout, pour en revenir à l’idée initiale, je crois que les artistes doivent aussi réfléchir à la forme la plus adaptée à leur message. Le public face à eux est confronté à une multitude de propositions. Il est vraiment important de pousser le curseur de la réflexion le plus loin possible pour la lisibilité de l’œuvre. L’art doit aussi passer par une considération sur ceux qui vont le recevoir. En tout cas quand on souhaite les toucher (et possiblement en vivre). Il est évidemment aussi possible de faire de l’art pour soi et c’est très honorable comme démarche.
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