OPINION: t-shirts, gatekeeping et noms des musiciens

Comme vous le savez, j’aime beaucoup traîner sur twitter/x, une source quasi infinie de débats autour de la musique. Cela me permet régulièrement de m’interroger sur ces sujets et de vous proposer mes réflexions livrées à vif ! Voici donc le dernier débat pop corn du réseau social ! Il implique T-shirts, gatekeeping et noms des musiciens.

Un résumé de la controverse

Un utilisateur de twitter/x s’est pris une volée de bois de vert pour avoir soulevé un point. Suite à la récente disparition de Clem Burke, batteur de Blondie, il raconte (pas sûr que ce soit vrai) avoir évoqué le sujet avec quelqu’un qui portait le t-shirt du groupe à ce moment là. La personne n’aurait pas compris de quoi il parlait.

Il en fallait pas plus pour ressortir un des marronniers des amateurs de musique. Une attitude qui horripile beaucoup de gens: tu portes un t-shirt de ce groupe ? cite trois chansons ! Nous ne sommes pas là pour contredire ces derniers car cette attitude est misérable mais s’agit-il de ça ici ?

La personne qui s’en étonnait était-elle agressive/méchante ? Est-ce que la personne qui a réagit était totalement indifférente ? Nous manquons de contexte pour se faire une idée précise !

les t-shirts de groupes

Les t-shirts font parti de l’uniforme de l’amateur de musique. Avec les badges ou les patches se sont des signes d’appartenance. Souvenez vous quand vous écriviez au Tipp-Ex sur votre sac Eastpak. En primaire, nous étions deux pelos à porter des t-shirts de metal (Iron Maiden etc.), un lien intangible entre nous.

Voilà la qualité singulière de ce média: sa capacité à nous connecter aux autres. Certains t-shirts de groupes (Joy Division, Nirvana, Fleetwood Mac, Ramones) sont devenus des icones en tant que tels. Les gens qui les portent désormais n’entretiennent pas nécessairement un lien profond avec ces groupes et peuvent simplement en apprécier l’esthétique.

Chacun est libre de faire ce qu’il veut, porter ce qu’il veut. Il n’est pas question d’en faire une histoire. Malheureusement, certains y réagissent agressivement, avec cette suspicion permanente d’être un authentique fan ou non. Cette attitude est puérile et déplacée, mais quid des gens qui veulent se connecter aux autres à travers ce média, de manière positive et sincère ?

Gatekeeping

Je suis allé faire un tour sur wikipedia pour regarder la définition (lien). Je pense que le terme gatekeeping a changé de sens, en tout cas dans la sphère musicale. Il ne s’agit pas tant de retenir des informations cruciales (comme ne pas donner ses coins à champignons !) que d’empêcher l’accès à quelque chose. La nuance est légère mais elle existe selon moi ! D’un coté, il s’agit de ne pas donner des informations, de l’autre c’est au contraire d’en réclamer pour accepter quelqu’un.

Les adeptes du gatekeeping veulent alors garder un groupe pour eux, ne pas le partager avec les autres. Ils voient ainsi d’un mauvais œil la diffusion de la musique d’un groupe. Si le principe est louable (de dénoncer le gatekeeping), il devient une attaque classique pour tous ceux qui osent parfois contredire un narratif poptimiste. Très vite, la personne pourra aussi être considéré comme un snob (en quoi est-ce une insulte ?).

Il y a là un discours dérangeant sur le savoir, pourquoi le savoir serait nécessairement une arme pour humilier l’autre (ça c’est mal) ? Non le savoir ouvre aussi le champ des possibles. Une idée que j’ai par exemple développé dans ce texte: Poptimisme La Victoire des Brutes.

Le nom des musiciens

Toujours autour de cette petite controverse, j’ai relevé ce tweet que je trouvais intéressant à décortiquer (et dénoncer). En substance, la personne considère que connaître le nom des musiciens n’est pas si utile à un massive music nerd. J’ai un problème avec cette affirmation.

Il ne s’agit évidemment pas de connaître qui joue du tambourin sur un album avec une centaine d’intervenants, mais connaître des musiciens clés, des producteurs, des compositeurs, aident vraiment dans le chemin d’un ou une passionné(e).

Pour moi, connaître le nom des musiciens apporte au moins trois choses:

  • rendre hommage à ceux qui ont créé la musique que nous chérissons,
  • nous permettre de découvrir d’autres groupes/disques,
  • connecter des œuvres que nous aimons.

La musique est une émanation de l’humanité, je le rappelais notamment dans mon texte sur l’apathie autour de l’IA. Il y a des gens derrière ces noms parfois abscons, il faut aussi célébrer leur travail et leur talent.

J’ai fait plusieurs articles sur comme découvrir de la musique. Je trouve très efficace de s’intéresser aux noms derrière. Avec un musicien vous pouvez découvrir dix autres groupes. Par exemple, à partir de R.E.M. on peut découvrir The Replacements (Peter Buck joue sur un de leurs morceaux) ou de nombreux groupes jangle pop/powerpop (Let’s Active, Big Troubles, The Windbreakers, The Smithereens, Guadalcanal Diary etc.) par la connexion Mitch Easter/Don Dixon.

Enfin, s’intéresser aux gens qui font la musique permet de relier les points entre les choses que nous aimons. En découvrant, love is the drug de Roxy Music, j’ai tout de suite pensé à Talking Heads. Il y a effectivement un lien concret entre ces deux groupes: Brian Eno (membre de Roxy Music et producteur des premiers albums de Talking Heads). Ces informations, mises bout à bout, amènent du sens à tout cela, permet d’avoir une vue d’ensemble.

L’idée de savoir les noms des musiciens est comme ce dont nous avons précédemment parlé: il ne s’agit pas d’accumuler un savoir pour le plaisir de l’anecdote ou celui d’humilier les autres. Ce savoir est avant tout un moyen d’aller vers les autres, pousser plus loin dans son exploration, d’établir de nouvelles connexions avec la musique que l’on aime. Peut être snob ou nerd, mais ce n’est certainement pas du gatekeeping !

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