En février dernier, j’évoquais avec vous, la C86, ce courant indie-pop britannique du milieu des années 80. Les Etatsuniens étaient également actifs à l’époque ! Cela passait notamment à travers la Jangle pop, un des courants artistiques indépendants parmi les plus importants de la décennie là bas.
À l’inverse du terme C86 d’époque, je n’ai pas la certitude que Jangle pop fut spécifiquement populaire parmi les groupes ou la presse musicale de l’époque. Il faut dire que la démarcation d’autres styles musicaux, en particulier la powerpop, le Paisley underground ou le college rock est quelque peu artificielle ! D’ailleurs certains groupes de l’époque peuvent tout à fait appartenir à plusieurs de ces genres.
Essayons néanmoins d’en tracer les contours. À la fin de la période post-punk, il y a un réel intérêt pour la musique du passé sans être dans le revivalisme. Le punk voulait faire tabula rasa du passé mais la génération suivante ne voulait pas renoncer à The Byrds ou au Velvet Underground. Deux groupes en particulier posent ainsi les fondations de la musique underground des années 80: The Smiths et R.E.M.. Les deux ont en commun d’avoir des guitaristes (Johnny Marr et Peter Buck) dont le son et les mélodies convoquent la Rickenbacker de Roger McGuinn.
Ainsi, aux Etats Unis, le groupe d’Athens, en Géorgie, pose les bases d’un esprit vraiment typique des années 80, désormais souvent qualifié de Jangle pop. En plus d’avoir une sensibilité 60s (dans les mélodies et les guitares), cette musique est (logiquement) en marge des synthétiseurs qui envahissent les radios à l’époque. Les paroles sont aussi souvent cryptiques et mystérieuses.
S’il y a des exemples assez évidents dès la fin des années 70 et surtout au début des années 80 (The dBs, The Bongos voir The Feelies me viennent immédiatement en tête), je pense que 1983 marque un tournant pour la musique en général, en particulier aux Etats Unis. Cette année là, les synthétiseurs deviennent véritablement très populaires dans la musique mainstream. Au même moment The Smiths sortent leurs deux premiers 45 tours (Hand in Glove et This Charming Man) tandis que R.E.M. publie son premier album, le remarquable Murmur. La Jangle pop est en marche !
Pour aller plus loin, nous vous recommandons la compilation Strum & Thrum de Captured Tracks, publiée en 2020. Mentionons aussi la compilation Poptopia! de Rhino.
01 – R.E.M. “Sitting Still” (1983, Athens, Géorgie)
Impossible de ne pas démarrer une playlist consacrée à la Jangle pop sans le groupe majeur de la période aux Etats Unis: R.E.M.. On notera la présence de Mitch Easter et Don Dixon à la production de ce premier album, ces deux musiciens/producteurs vont marquer l’époque ! Athens, la ville d’origine de REM c’est aussi évidemment des B52s et Pylon.
02 – Rain Parade “You Are My Friend” (1984, Los Angeles, Californie)
Là je fais un choix peut être plus personnel. Rain Parade est avant tout un groupe associé au Paisley Underground, un mini mouvement californiens qui concernent des formations principalement de Los Angeles, Sacramento et Davis. Reste que le Paisley et la Jangle pop partagent de nombreuses références communes, à commencer par les Byrds comme en témoigne cet excellent morceau. À ce moment là David Roback a déjà quitté le groupe (tandis que son frère Steven est bien là lui) pour former Opal puis Mazzy Star.
03 – Game Theory “24” (1985, Davis, Californie)
Game Theory, de Davis, est typiquement un groupe facile à associer à la fois à la Jangle pop et au Paisley Underground. Real Nighttime (1985), leur premier album est produit par Mitch Easter (producteur des deux premiers albums de REM) tandis que Michael Quercio (des Three O’Clock) joue dessus ! Ce dernier sera officiellement membre du groupe à la fin des 80s. Scott Miller est cependant l’âme du groupe.
04 – Let’s Active “Every Word Means No” (1983, Winston-Salem, Caroline du Nord)
Rentrons à nouveau dans le vif du sujet. La Caroline du Nord est indéniablement (peut être avec la Géorgie) l’épicentre de la Jangle pop des années 80. Cette position centrale, nous la devons en grande partie à Mitch Easter et son groupe Let’s Active. Impossible de mentionner toutes les productions de Mitch Easter (Pylon, Marshall Crenshaw, The Connells, Game Theory, REM etc.) mais indéniablement le son de la Jangle pop des années 80 lui doit énormément.
05 – The Connells “I Suppose” (1987, Raleigh, Caroline du Nord)
Autre groupe de Caroline du Nord, The Connells est surtout connu pour leur hit du début des années 90 (74-75). Pourtant leurs premiers disques sont charmants et à redécouvrir, notamment le second Boylan Heights paru en 1987.
06 – The Replacements “I Will Dare” (1984, Minneapolis, Minnesota)
The Replacements est un des groupes majeurs de l’underground américain des années 80. Pas à proprement parlé un groupe jangle il n’empêche que la superbe I Will Dare a toute sa place ici, d’autant plus que Peter Buck (REM) joue dessus !
07 – Guadalcanal Diary “Trail of Tears” (1984, Marietta, Géorgie)
Retournons en Géorgie avec ce groupe très emblématique de la scène indépendante des années 80. Guadalcanal Diary publie 4 albums dans les années 80 avant de se séparer. La superbe Trail of Tears est extraite de Walking in the Shadow of the Big Man, leur premier album, produit par nul autre que Don Dixon (co-producteur de Murmur avec Mitch Easter !).
08 – The Reivers “Araby” (1985, Austin, Texas)
On reste dans le sud mais dans le Texas, à la découverte du genre New Sincerity, une éphémère scène d’Austin dont The Reivers (Zeitgeist) était un des groupes les plus connus. Translate Slowly , leur premier album mérite vraiment d’être réécouté ! La pochette renvoie, je trouve, à celle du deuxième album de Big Star dans les couleurs et la structure.
09 – The Windbreakers “Can’t Go on This Way” (1985, Jackson, Mississippi)
Nous restons dans le sud des Etats Unis avec les excellents Windbreakers du duo de compositeurs Tim Lee et Bobby Sutliff. Un groupe, logiquement, très apprécié dans les cercles powerpop ! On retrouve Don Dixon à la production de Terminal (1985).
10 – Dumptruck “Secrets” (1987, Boston, Massachussetts)
C’est en faisant mes recherches pour cette playlist que j’ai découvert Dumptruck. J’ignorais l’existence de ce groupe jusque là ! Une formation de Boston auteure de plusieurs albums dans les années 80. Secrets est extrait de leur deuxième disque, Positively Dumptruck (1987). Enregistré dans les studios de Mitch Easter (en Caroline du Nord) par Don Dixon: cet album avait tout pour trouver sa place ici !